Nezumi Hashimoto pète les plombs.

 

(Partie I)

 

Après une petite fête, je me dirige vers ma chambre à pas de loup comme ceux qui ont trop bue. Je passe devant sa chambre. Je vais pour entrer dans la mienne quand je l'entends qui m'appelle.

<< Nezumi ? C'est toi ? Eh viens entre.>>

La chambre de Makkura est baignée d'une lumière bleuâtre. Il regarde la télévision dans le noir, tout seul. Torse nu, pas rasé, il est adossé aux oreillers. Il tapote le lit à côté de lui pour m'inviter à m'asseoir.

<< Salut Makku'. Tu as passé une bonne soirée ? je lui demande en me posant tout au bort du matelas, dans un équilibre un peu précaire.

- Bah... oui. Je suis resté ici. J'ai été très sage, bien sûr. Ce n'est pas très marrant. Tes amis allaient bien ?

- Oui très bien, je réponds d'un ton impassible. Tout s'est très bien passé.>> Je revois le visage rouge de colère de Shiro au moment où je suis sortie de la maison et, horrifiée, je sens mes yeux s'emplir de larmes. Par chance, il fait assez sombre pour que Makkura ne s'en rende pas compte. Je me dépêche de les essuyer du revers de la main.

<< Très bien ? répète Makkura d'un ton perplexe.

A t'entendre, on dirait que je n'ai pas raté la soirée du siècle, ma chère fausse petite amie.

- Oh, tu sais...>> Je garde la tête baissée pour qu'il ne voie pas mes yeux humides. << C'était une soirée entre vieux potes, quoi. Rien d'extraordinaire.

- Entre vieux pote, hein ? Tu ne veux pas te coucher un peu à côté de ton nouveau pote ? propose-t-il en tapotant l'édredon à côté de lui.

-...ccord>>, je réponds en étouffant un hoquet.

L'édredon est satiné, frais et glissant. Je dois m'y reprendre à deux fois pour m'étendre à côté de lui.

<< Tu ne serais un peu bourrée, ma fausse petite amie ? demande-t-il en se tournant vers moi avec une tendresse amusée.

<< Peut-être un peu. Pardon. Mais je suis surtout très, très fatiguée.>> Je soupire en m'enfonçant dans l'édredon. C'est vrais que je suis fatiguée. Épuisée même.

<< Attends.>> Makkura me glisse un oreiller sous la tête.

Je découvre avec étonnement que son odeur habituelle de clope et de denim sale a cédé la place à un parfum de savon et de shampooing aux agrumes.

<< Je ne sais pas..., dit-il avec un petit rire. Il me semblait que tu étais censé me garder dans le droit chemin, Nezumi Hashimoto. Pas me montrer le mauvais exemple en rentrant à pas d'heure bourrée.

- Rhô, tais-toi>>, je murmure depuis mon cocon entre les coussins. Mes cheveux sont tombés sur mon visage, mais je n'ai pas la force de les repousser. Du coup, je sens le bout de ma frange qui me chatouille le nez quand je respire. <<Pas le mauvais exemple. Le bon exemple. Un exemple raisonnable, il parait. Nezumi Hashimoto est une fille raisonnable et sage.

- Là, tout de suite on ne dirait pas !>> assure Makkura en riant. Il s'allonge à côté de moi et reprend la télécommande. Il me donne un petit coup de genou dans la jambe. << Tu vois ? me taquine-t-il. Je savais que je finirais par arriver à te mettre dans mon lit.

- Hm, oui.>> Je bâille. Je sens mes paupières se fermer. << Je n'y peux rien, Makkura. Tu es irrésistible.

-Eh oui, je sais.>> Je ne trouve pas l'énergie de tourner la tête vers lui, mais je devine qu'il sourit.

J'écoute son souffle régulier, tandis que nous rentrons étendus, immobiles, ensemble. J'avais oublié combien il était réconfortant de se trouver dans un lit avec un autre corps tout prés du sien. De se sentir protégée. Même ce Makkura, qui zappe sans relâche, s'intéressant bien plus à la télévision qu'à moi.

Il monte le volume d'un cran. J'entends des coups de feu et des cris.

<< Qu'est-ce que tu regardes ? je demande d'une voix ensommeillée.

- Les Sept Mercenaires, répond-t-il. Tu sais, Yul Brynner, les cow-boys, tout ça.

- Ouais, Yul Brynner. Les Sept Mercenaires. Sympa.>>

Je ferme les yeux. Rien qu'un instant. Je vais juste me reposer un petite peu avant d'aller dans ma chambre.

Je me réveille en sentant qu'on me caresse les cheveux, lentement, doucement. C'est divin. Sans ouvrir les yeux, je m'étire comme une chatte. Combien de temps ai-je dormi ? La main glisse de mes cheveux à mon visage et suit délicatement la ligne de mes sourcils, puis mes pommette, mes joues. Suis-je en train de rêver ? Un doigt descend sur l'arrête de mon nez, jusqu'à mes lèvres, où il s'immobilise. J'ouvre les yeux. Le visage de Makkura est tout près du mien. La télévision est éteinte. Il fait encore nuit. Tout est très calme, il détache doucement le doigt de ma bouche, puis m'embrasse, avec toujours autant de douceur.

Je me dis : Cela ne fait pas partie de notre accord. Je me dis : En plus il ne me plaît même pas. Je me dis : Dès qu'il parlera, je lui dirai d'arrêter.

Sauf que je suis comme hypnotisée par son regard fixe, et qu'il ne dit pas un mot. Il éloigne la main de mon visage, et je sens qu'il défait habilement les premiers boutons de mon chemisier pour exposer le haut de mon soutient-gorge. Il baisse la tête pour déposer des baisers de papillon le long de mes épaules, jusque dans le creux à la base de mon cou. Je sens ses doigts sur moi, et le reste de mes boutons qui cèdent un à un. Il ouvre complètement mon corsage et embrasse mon sein droit, puis le gauche. Puis il fait descendre mon chemisier le long de mes bras en me regardant, les sourcils haussés d'un air interrogateur, comme pour me dire :<< Dès que tu me le demandes, je m'arrête.>> Mais je me tais. Pour me faire languir, il suit le motif de la dentelle de mon soutient-gorge. L'impatience me fais cambrer malgré moi pour presser mes seins plus fort dans ses mains. Et puis voilà qu'il tire sur la ceinture de mon jean pour m'attirer à lui. Il m'embrasse plus fort, avec plus d'impatience. Il me mordille la lèvre inférieure et me fais venir à lui en plaquant mes hanches sur son bassin pour que je le sente.

Je me dis : C'est maintenant qu'il faut que je l'arrête.

Au lieu de quoi je me retrouve en train de me tortiller sans la moindre gêne pour l'aider à m'enlever mon pantalon, que je pousse à terre à coup de pied. Il dégrafe mon soutient-gorge et me repousse sur le lit. Je suis couchée sur le lit de Makkura Kurosawa presque sans rien et lui, de sa main, trace des petits cercles sur mon ventre. Des petits cercles qui descendent, lentement, prudemment, mais sûrement. Il sourit en descendant sur mes cuisses.

Je me dis : Une bonne centaine de fille ont dû passer par là avant moi. Je me dis : Oh mon dieu ! Quel cliché je fais ! Je me dis : Ça m'est égale.

J'en ai assez d'être raisonnable.

Et c'est fantastique.

<<T'es sûr ? C'est que pense vraiment cette gamine ?

- Puis que je te dis que cette enfant rêve du "grand méchant loup". Je ne mentirais jamais à mon petit frère adorée.

- Si tu l'dis.>>

Makkura regarda le visage de Nezumi pleine de joie.

<< Tu verras, après tu lui tiendra des propos absurde tel que : Mais Poupée au plumard nous nous éclatons bien comme des lapins Duracell.>>

Makkura dévisagea sa sœur, puis re regarda Nezumi. Quand même il a bien envie d'en faire son 4h.

 

(Partie II)

 

Je suis assise dans un petit café français au coin de la rue, cela fait deux semaines que j'ai envoyé une lettre d'excuse à Shiro sans aucune réponse, et je défends la chaise réservée pour Nishibi contre les assauts de tous ceux qui viennent boire un verre après le travail. J'ai beau avoir posé mon manteau sur le dossier et un journal sur le siège, cela n'empêche pas les vautours de s'approcher toutes les deux minutes pour me demander : << J'imagine que cette chaise n'est pas...?>> Je secoue poliment la tête. << Désolée.>> Je verse même du vin rouge dans le verre vide pour faire croire qu'il y a quelqu'un d'assis à cette place. Si ça continue, je vais commencer à faire la conversation tout haut avec mon amie imaginaire. Ça devrait vraiment décourager les gens.

Bien que le Club des vieilles filles sois dissous depuis que Nishibi est officiellement avec Shôta - je m'avoue encore célibataire, mais une personne ne peut former un club à elle seule -, nous avons décidé de recommencer à nous voir le mercredi soir, à compter d'aujourd'hui.

C'est la première fois que je reviens ici depuis cette fameuse soirée où Nishibi a décrété qu'il fallait que je sois plus féminine. On peut dire, je crois, que j'ai rempli ma mission au-delà de toute espérance. Je suis peut être la dernière "vieille fille" du club, mais, au moins je ne suis plus la célibataire quasi pathologique d'il y a trois mois. Makkura s'est conduit comme un imbécile, et j'ai survécu. Je ne dis pas que, s'il entrait là, tout de suite, j'en serais ravie, mais, quand j'ai vu dans le dernier numéro de Hot Slebs qu'il avait ajouté Jun Mochizuki à son tableau de chasse, ça m'a davantage fait rire que pleurer. Et cette expérience me prouve qu'une relation qui se termine ne me transforme pas forcément en l'épave sanglotante comme à ma dernière rupture. J'arrive à me relever de mon aventure avec Makkura et des humiliations la tête haute. Et en restant moi-même.

<< Pardon, il y a quelqu'un d'assis ici >>, dis-je à un énième voleur de chaise.

Nishibi avait raison. Il fallait que je me lâche un peu pour sortir de l'ornière dans laquelle j'étais tombée accidentellement. Makkura m'en a tirée à la manière d'un électrochoc- d'un façon extrême, ridicule, mais peut-être vitale. Cependant, ces dernières semaines, j'ai constaté- à mesure que les éléments de ma vie d'avant Makkura reprenaient peu à peu leur place- qu'être organisée, prévoyante et contrôler certaine choses faisait partie de moi. Je ne serai jamais Nishibi. J'aimerais bien être le genre de fille qui se baigne nue dans un fleuve avec le bel étudiant en art dramatique de vingt-quatre ans qui s'occupe des pédalos (le M. Mai de Nishibi), mais je ne le suis pas. Et c'est très bien ainsi. Il est temps que je commence à être moi-même. Je peux m'ouvrir à de nouvelles expériences et garder une cuisine propre et rangée. Je peux m'assouplir un peu, mais une partie de moi aura toujours besoin d'une certaine routine pour se rassurer. Je ne vais pas aller en parler à un psy : il mettrait ça sur le dos de ma ma relation avec ma tante, comme il le font toujours. C'est ainsi, et c'est tout. Je le sais. Je peut être la fille qui range ses chaussures par couleur, et quand même avoir un petit ami. J'avoue que j'aimerais mieux qu'il soit ordonné. Ce serait plus facile.

<< Non, désolée, cette chaise est prise. >> Je souris aimablement, mais fermement. Où est Nishibi, enfin ?

Du reste, ma vie change déjà. Je vais avoir beaucoup à faire, à mon nouveau poste chez Africain Vision. Je commence lundi. Oui, oui, j'ai renoncé à ma grande carrière de bénévole sexy. Mes désirs de destinations exotiques en ont prit un coup quand j'ai commencé à y regarder de plus près. Disons qu'il y a une époque de la vie où l'on peut prendre des douches froides, dormir dans un hamac et se contenter de toilettes à la turque ; selon moi, c'est avant trente ans. J'ai laissé croire à une de mes amies que c'était son pouvoir de persuasion qui m'avait fait changer d'avis. Elle ne saura jamais le rôle que l'eau courante à joué dans ma décision.

<< Désolée, cette chaise est prise >>, dis-je pour la quarantième fois au moins. Celui-là ne manque pas de culot. Il a déjà mis la main dessus et la tire avec détermination. << Excusez-moi ! J'ai dit...>> Je lève les yeux, en colère.

<< Shiro !

- Salut Nezumi, fait-ils en me regardant avec l'ombre d'un sourire. Je peux m'asseoir ? >> Il garde la main au-dessus du dossier sans bouger la chaise.

<< Euh... oui. Oui bien sûr, je bafouille, stupéfaite de le voir ici. Enfin, c'est-à-dire... je garde la place pour Nishibi. Elle doit arriver d'une minute à l'autre. Il faudra que tu la lui laisses. >>

Oh, dépêche toi, dépêche toi, Nishibi ! Ne me laisse pas là toute seule avec lui. C'est trop bizarre. A moins qu'il ait rendez-vous avec Madoki et que je doive tenir la chandelle pendant qu'ils s'embrasseront et se peloteront passionnément.

<< Nishibi ne vient pas >>, annonce Shiro en accrochant sa veste par-dessus mon manteau, sur le dossier. Puis il s'assied, les épaules voûtées d'une façon qui le fait paraître bien trop grand pour la chaise et la petite table qui nous séparent.

<< Mais elle ne m'a pas prévenue...>> Je prends mon téléphone pour vérifier que je n'ai pas de nouveau message.

<< Je lui ai demandé de ne pas le faire, Nezumi, explique-t-il avec un air sombre et résolu qui me fait peur. Je voulais te voir seul à seule.

- Tu n'as pas rendez-vous avec Madoki ? >> je demande nerveusement, m'attendant à la voir arriver à tout instant.

- Non, lâche-t-il en fronçant les sourcils. C'est fini. Ça n'a pas marché.

- Je suis désolée.

- Il n'y pas de quoi, m'assure-t-il en me servant du vin. Je suis pas venu ici pour parler d'elle, mais pour te parler. >>

J'aimerais vous dire que cette déclaration, tout comme la soudaine apparition de Shiro, m'emplit d'une folle joie et me fait reprendre conscience que c'est lui mon grand amour. Je sais bien comment ce genre d'histoire est censée se terminer. Mais, la vérité c'est que je ressens la même angoisse, jusqu'à la nausée, que lorsque je me suis retrouvée en haut du grand plongeoir de la piscine avant que mon frère et mes parents me quitte. Cette fois-là, j'avais pu battre en retraite, honteuse, et redescendre par l'échelle. Mais aujourd'hui je ne vois pas d'échappatoire. Croyez-moi, j'ai déjà discrètement passé en revue les issues possibles. La seule qui ne m'oblige pas à passer tout près de Shiro serait la trappe sous le bar, qui débouche sur la cave. Mais il faudrait pour l'atteindre que je saute par-dessus le comptoir telle une championne olympique de saut en hauteur. C'est donc une option que j'écarte avec regret. Pour l'instant en tout cas.

<< Shiro je suis désolée de ne pas t'avoir dit ce qu'il en était, pour Makkura >>, dis-je le plus rapidement possible, pour en finir au plus vite, comme quand on arrache un pansement, avant qu'il ne se mette à me crier après.

Il se contente de me regarder, sans rien dire, en faisant tourner le pied de son verre entre doigts.

<< Je... je me suis trouvée embarquée dans cette idiotie de fausse relation, je bafouille. Et je ne pouvais en parler à personne, parce que je l'avais promis et... et tu étais si gentil, si protecteur quand tu as voulu me mettre en garde... et je ne voulais pas te mentir, mais je ne pouvais pas te dire la vérité. Enfin...ce n'est pas une excuse. Je suis désolée, Shiro. Vraiment désolée. >>

Il continue de me regarder en silence, les lèvres réduites à une ligne. Il est impossible de dire s'il se retient de se mettre en colère ou d'éclater de rire.

<< Je me suis vraiment très mal conduite >>, je poursuis obstinément. Il veut vraiment que je rampe, on dirait.

<< J'aurais dû être honnête, Shiro. J'ai perdu mes de vue ce qui était important, et...

- Ah. Et qu'est-ce qui est important ?>> demande-t-il soudain en inclinant légèrement la tête.

Je jauge la hauteur du bar. Me ferais-je vraiment mal si je me jetais par-dessus et que je m'enfuyais par la trappe ? Ne serait-ce pas moins pénible que cette conversation ?

<< Euh... ce qui est important ? >> je répète, de plus en plus nerveuse. Que veut-il, au juste ? Du sang ?

<< Oui. Tu as dit que tu avais perdu de vue ce qui était important, confirme-t-il sans sourire. Alors, qu'est-ce qui est important ?

- Eh bien...>>, je commence. J'ai l'impression de passer un entretien d'embauche auquel je ne me suis absolument pas préparée. << Euh... l'amitié, c'est important. Notre amitié je veux dire. Et dire la vérité.

- Et ?

- Hmm... et l'honnêteté ? L'honnêteté envers soi-même autant qu'envers les autres.

- Et ?

- Merde, à la fin, Shiro ! Qu'est ce que tu veux que je dise d'autre ? je proteste, exaspérée. Si tu veux que je mette un cilice, passe-m'en un et je le ferai. Je suis désolée, je te l'ai dit, je ne sais pas quoi ajouter. >>

Ces excuses ne se déroulent pas tout à fait comme je l'avais imaginé.

<< Malheureusement, je n'ai plus de cilice, répond Shiro en esquissant enfin un sourire ironique.

_ Un grand bâton, alors, peut-être, pour que je puisse me flageller ? Avec des épines, pour le châtiment maximal ?

_ Non, pas de bâton non plus, dit-il en riant

_ Bon, alors si tu me refuses la mortification de la chair, Shiro, il va falloir que tu t'en passes pour me donner l'absolution. >> Je le regarde et je commence à espérer. S'il rit, il ne peut pas être fâché contre moi.

<< Tu n'as pas besoin de te flageller, Nezumi. Ni avec un grand bâton ni d'aucune autre façon. Bien sûr que je t'en ai voulu. Ce n'était pas facile, de te parler de Makkura. Je me suis dit que ça allait vraiment te faire mal- mais que tu aurais encore plus mal si tu n'étais pas au courant...

_ Shiro ?

_ Attends, laisse moi finir. >> Il fronce les sourcils et passe une main dans ses cheveux bruns. << Alors quand j'ai découvert que tout ça n'était qu'un canular, un coup monté, ça... ça m'a fait comme si tu t'étais moquée de moi dans mon dos avec ce connard.

_ Oh Shiro ! Nan ! Jamais je n'ai parlé de toi avec Makkura. Jamais je ne me suis moquée de toi dans ton dos, ni avec lui, ni avec personne. Mais, écoute... assez parlé de lui. Ce qui compte, c'est nous.

_ Nous ? >> Il hausse un sourcil, l'air intéressé.

<< Tu vois bien ce que je veux dire. >> Je laisse retomber mes cheveux devant mon visage et m'absorbe dans la contemplation de la table, au cas où un précédent client y aurait creusé une autre issue de secours.

<< Ah bon ? >> Il se penche en avant sur la table qui tangue dangereusement, ce qui l'oblige à reprendre son verre de vin et à se redresser.

<< Ce que je veux dire, Shiro, je lui explique en essayant de le regarder dans les yeux- ce qui est difficile, parce que je surveille aussi ses lèvres pour voir s'il sourit-, c'est que Makkura appartient au passé...

_ Et ses fringues aussi, marmonne-t-il. Ouai, ce look 100% jean, putain...

_ Shiro ! Tait-toi ! >> Je me penche sur la table et lui donne un coup sur le bras pour qu'il m'écoute. << Je tien à ce que tu saches que mon histoire avec Makkura est finie. Terminée. Ce que je veux dire, c'est que notre amitié, à toi et moi, compte beaucoup plus que tout ce qui a pu se produire dans le passé. OK ? >>

Shiro sourit. A la façon dont son regard brille, je commence à espérer qu'il m'a pardonné. Il prend son verre de vin et le lève vers moi.

<< A l'amitié, Nezumi Hashimoto >>, dit-il en me prenant la main de sa main libre.

Et, soudain, à ce simple contact, je me retrouve en haut du grand plongeoir de la piscine. En proie à un mélange de panique et d'excitation. Dévorée par une terrifiante impatience. Un vertige étourdissant. Il y a quelque chose là, entre nous et la crainte de ne rien faire devient plus grande que celle de faire quelque chose.

Mon cœur cogne dans mes oreilles, si fort que je n'entends plus rien. Toute la salle devient floue à l'exception du visage de Shiro, qui me regarde d'un air interrogateur.

Je vais sauter.

Je tiens la table pour la stabiliser, me penche en avant et pose un instant mes lèvres sur les siennes.

Je ne sais pas à quoi je m'attendais. A vrais dire, c'est ce qu'il y a de mieux dans ce geste : je n'ai pas pesé le pour et le contre, je ne me suis pas souciée des conséquences.

Ce qui est certain, en revanche, c'est que je ne m'attendais pas à ce que Shiro se mette à rire. Alors voilà. Pour une fois que je prends un risque, regardez où ça me mène. Je viens d'embrasser mon ami d'enfance, et il est mort de rire. Je me sens mise à nue, aussi gênée que si je m'étais retrouvée d'un coup assise là en sous-vêtements. Je ne vais jamais m'en remettre. Des rires résonnent dans le bar. J'ai beau savoir que c'est le bruit de font les gens qui s'amusent (je les déteste tous), j'ai l'impression qu'ils font chorus avec Shiro pour me ridiculiser.

<< Oh, mon Dieu... pardon, Shiro. >> Je rougis furieusement. << Je ne sais pas ce qui m'a pris.

_ Nezumi Hashimoto, tu es une femme pleine de surprises, déclare-t-il avec un reste de sourire narquois.

_ Ouais, c'est ça. >> Je prends mon sac à main sur la banquette. Il est temps que je m'en aille- et pas par la trappe. << Excuse-moi de t'avoir mis mal à l'aise. Il faut que j'y aille.

_ Rassieds-toi >>, dit-il en me repoussant doucement sur mon siège.

Je le dévisage. J'ai l'impression que, si je ferme les yeux, je me souviendrais des moindres détails. Ses yeux violet, si sombre quand il est en colère ou ému. Ses cheveux montés en crête. Son air gentiment moqueur, un sourcil levé.

<< Nezumi Hashimoto, dit-il avec le plus grand sérieux, est-ce que tu me dragues ? >>

Je voudrais que la terre s'ouvre et m'avale d'un coup.

<< Euh, non. C'est une erreur. C'est un... euh... un accident Shiro. Ha, ha ! >> Je m'assieds sur mes mains pour m'empêcher de les tordre littéralement de honte. << Excuse-moi.

_ Oui, bon. C'est tout à fait compréhensible, assure-t-il en se rapprochant. Ce sont des choses qui arrivent. >>

Alors, il prend mon visage entre ses mains et glisse les doigts dans mes cheveux. Ses lèvres tombent sur les miennes d'une façon qui n'a rien d'accidentel. J'ai l'impres sion d'avoir tout le corp en coton. Je ne pourrais pas bouger un membre si ma vie en dépendait.

<< Oups ! fait-il d'un air légèrement moqueur en s'écartant. Pardon : j'ai dû glisser. >>


Nishibi arriva alors malicieusement comme si elle avait observé la scène de loin. Elle prit Shiro à part et discuta quelques instants avec lui.

_ Tu es sûr Nishibi ?

_ Bien sûr je ne pourrais mentir au futur amant de ma meilleur amie. Dit-elle avec un sourire narquois.

Il se retourne vers Nezumi qui les regarde d'un air perplexe. Puis se retourne vers Nishibi pour rétorquer.

_ Tu est sûr que je serais jouer l'homme que tu as décris ?

_ Tu l'aime oui ou non ?!! Alors tu vas un petit effort sinon ta belle Nezumi va te passer sous l'nez.

Il se retourne pour regarder le visage rayonnant de Nezumi. Nishibi lui tape sur l'épaule gauche pour l'encourager.

 

(Partie III)

 

Ce matin nous avions tous une idée de notre matinée... Nishibi voulait bronzer au bord de la piscine- ce qu'elle fit à merveille, Reiku voulait apprendre à Asaki comment cuisiner un carpaccio. Quand il avait proposé cette idée à Asaki la veille, des étoile brillaient dans ses yeux... Senji, lui, je ne sais pas, et moi voir le paysage qu'entourait la villa que nous occupions. Je me suis bien promener j'ai même atteint la place du village ou j'entendais une faible musique. La musique que j'avais entendu sur la place du village s'amplifiait; J'en compris l'origine quand j'atteignis un petit restaurant au coin d'une rue. J'y pénétra dans la salle fraiche, sombre, quasi déserte. Mon corps vibrait déjà au son de la musique. J'avais envie de danser, ou de se soûler. Envie de se perdre complètement.
Calme en apparence, je m'assis à une table de bois près de la fenêtre et commanda un verre de vin rouge. La première gorgée me parus un régal suprême. Je grignota une olive, ferma les yeux, écouta le rythme des guitares et les conversations en espagnol, à l'autre bout de la salle. Dégustant mon vin à petites gorgées, je laissa l'alcool prendre possession de moi, rompre doucement mes amarres. Peu à peu, je me sentis dériver, flotter.
Avant d'avoir tout à fait fini mon verre, je rouvris les yeux et chercha du regard le serveur pour en commander un autre. Tout à coup, j'éprouvai un choc énorme.
Dans un coin de la salle, Senji Aoki, assis, me fixait des yeux. Un verre de cognac devant lui, ainsi qu'une coupelle d'olives et un journal, il m'observait.


Mon cœur se mit à battre la chamade. Je bu une gorgée de vin, m'efforçant de rester calme, mais mes doigts tremblaient et mes lèvres frémissaient. C'est l'effet de surprise, me dis-je, tu ne t'attendais pas à le voir ici, tu ne t'attendais pas à rencontrer quelqu'un que tu connais.

Pourtant, tout au fond de moi-même, quelque chose commençait à bouger, à s'éveiller, à s'animer, à se manifester. Je jeta un coup d'œil du côté de Senji; il me regardait toujours, ses yeux claires la transperçaient, comme s'il lisait en moi. Sans se presser, il avala une gorgée de cognac et reposa son verre, les yeux toujours rivés sur les miens. Je soutins mon regard, près de défaillir d'appréhension et de désir.

La musique s'arrêta, quelques clients applaudirent. Ni Senji ni moi ne firent un mouvement. Un serveur vint enlever mon verre, je ne le remarqua même pas.

Finalement, Senji se leva, replia son journal, le lança sur ma table.

<< Bonjour, dit-il d'un ton grave en me tendant la main. Permettez-moi de me présenter. Je m'appelle Senji Aoki. >>

Je le dévisagea, le cœur battant à se rompre.

<< Bonjour >>, répondis-je d'une voix tremblante. Quand les doigts de Senji se refermèrent sur les miens, je sentis des picotement dans tout mon corps, << Je m'appelle Nezumi. Asseyez-vous je vous en prie. >>

La chambre était située sous les toits - une chambre claire, au mur blancs, avec des meubles en bois tout simples et un lit haut, à l'ancienne. << Les toilettes son sur le palier, avait expliqué le propriétaire du restaurant en tendant la clé à Senji, voilà pourquoi les touristes la boudent, mais peut-être que, senior... >>

Senji l'avait interrompu. << Cela ira, je vous remercie. >>

Sans un mot, nous avions grimpé l'escalier étroit aux marches grinçantes. Nous avions montés loin des bruit du restaurant, loin du reste du monde.

Quand la porte se referma derrière nous, Je ressentis au fond de moi un tremblement pareil au grondement du tonnerre dans le lointain, pareille à une secousse sismique quelque part dans une région éloignée, inconnue.

Les vibrations des guitares, dans la cour, traversaient le plancher et passaient de la plante de mes pieds à mes veines. Les gens, en bas, continuait à rire, à manger, à bavarder. Pendant ce temps, Senji et moi, dans cette chambre sous les combles, nous nous tenions debout, dans le pâle lumière, à quelque distance l'un de l'autre, sans nous parler, sans nous regarder, suspendus dans l'attente.

D'un geste lent, Senji posa une mais sur mon épaule, ce qui fit naître en moi une vague désir presque intolérable. Je ferma les yeux et me mordis les lèvres pour m'empêcher de crier. Pourtant, je ne bougea pas pas. Aussi longtemps que je le pu, je demeura immobile.

Puis je me tourna vers lui. Senji passa son autre main autour de ma taille, et nous commencions à nous balancer doucement au rythme de la musique, nous rapprochant de plus en plus, jusqu'à que nos corps se touchent. Senji effleura légèrement de ses lèvres les miennes, je sentis une nouvelle vague de désir me submerger. Je m'écarta de lui, m'infligeant cette torture afin de prolonger ce moment, de le savourer, sachant exactement ce qui allait se passer.

Dans la cour, la musique prit fin et l'on n'entendit plus aucun bruit. L'espace d'un instant, tout resta figé dans l'immobilité et le silence. Puis Senji pressa sa bouche contre la mienne, avec plus d'insistance, avec plus de passion. Cette fois, je n'opposa aucune résistance. Tandis que la musique reprenait en bas, je me livra tout entière aux baisers, aux caresses, aux souvenir, au désir, à la découverte, à la redécouverte. A la fin, je cria son nom, sanglotante et m'abandonnant au plaisir, telle une plume qui tombe lentement et se pose sur le sol.

 

«  C'est ce qu'elle me confessa ce matin : ce rêve assez sensuel avec toi... » confessa Reiku assez facilement à Senji ; lui rodant autour comme un serpent avec sa proie.

Senji resta sans voix. Puis ne voyant qu'une réaction de surprise (ce qu'il ne voulait pas trop voir...) chez son interlocuteur, Reiku reprit resserrant un peu plus sa queue de reptile autour de la pauvre petite souris...

« Tu sais une femme amoureuse est plus mature que ce que l'ont ne crois... Mais tu vois ce pur sang ? » désigne-t-il en pontait du doigt Shiro « Et ce lion là-bas ? » qui faisait référence à Makkura.

« Toi n'est qu'une pauvre petite souris et si tu ne deviens pas plus fort, si tu ne devient pas un loup cette chère petite gazelle va devenir la proie de ces deux bêtes sauvage !

Senji regarda à sa droite : Shiro ; et à sa gauche : Makkura. Le combat des coqs pour avoir Nezumi à déjà commencé...

Mais lequel des trois potentiel "amants" Nezumi va-t-elle choisir d'après vous ?

 

By Hats